29 novembre 2007
Pluie et brouillard sur Alger*
Il pleut en Algérie et cette pluie, loin d’être un cadeau du ciel, est une malédiction. Mustapha Mohammedi fait un sombre tableau de son pays dans le quotidien algérois Libération :
« Avaloirs bouchés, routes impraticables, trottoirs défoncés, trémie en cours de chantier fissurée, lézardée, vieux bâti totalement en ruine, asphalte mal rapiécé et, plus que tout cela, des morts. Des morts inutiles dont les municipalités auraient pu faire l’économie, si elles avaient fait preuve d’efficacité et écouté les doléances des citoyens. À Oran, des échauffourées ont opposé hier toute la journée les forces de l’ordre aux habitants d’El-Hamri parce qu’une dalle est tombée sur une jeune maman de 43 ans la tuant net. Là encore, les autorités locales n’ont pas réagi à temps. »
Dans un autre quotidien, Le Soir d’Algérie, Leïla Aslaoui témoigne :
« Six heures du matin, douche et petit-déjeuner à la lueur de la bougie. La panne a eu lieu dans la nuit. Ce n’est pas la première fois, et certainement pas la dernière, que le vent et les averses plongent la commune de Staouéli dans l’obscurité. Encore heureux que la coupure d’électricité n’ait pas été accompagnée de celle de l’eau. Lorsque c’est le cas, – cela s’est déjà produit – c’est le retour à l’âge de pierre assuré.
Au moment où j’achève ce récit, j’apprends par la presse que les intempéries ont fait de nouvelles victimes : 4 morts (La Casbah). Une raison suffisante pour demeurer à la maison ce jeudi puisqu’en 2007 la pluie tue en Algérie. Qui parle de vote?»
Oui, au fait, l’Algérie est en pleine campagne électorale. Le peuple est appelé à renouveler les conseils municipaux et régionaux. Et si j’en crois la presse algérienne de langue française, le pays n’est pas près de sortir de la corruption, de la fraude électorale et de l’incurie révélée par les intempéries. D’ailleurs la campagne électorale n’a jamais été aussi morose et l’abstention risque d’être une fois de plus massive.
Est-ce pour cela qu’un certain ministre s’est lancé dans une diatribe antisémite ? Fonds de commerce inépuisable pour faire diversion quand on n’a aucun bilan digne de ce nom à proposer au peuple « souverain ».
Oh tout de suite les vilains mots ! Mais non, il n’y pas d’antisémitisme, juste ce qu’un journaliste du cru décrit sur cinq colonnes à la une de sa gazette comme « un dérapage sémantique».
Un autre journal se fend d’un éditorial pour dire son agacement:
« En parlant des origines juives du président français et du lobby juif qui l’a propulsé à la tête de l’Etat français, s’est-il pour autant rendu coupable d’antisémitisme comme on le lui reproche outre-mer ? »
Pour outre-mer, comprenez la France et pour le reste, poser la question, c’est y répondre. Oui, doncques, Sarkozy le juif a été propulsé par le lobby juif. Et donc, ras-le-bol, poursuit l’éditorialiste au lieu de s’attarder sur les propos tenus et reniés par leur auteur:
C’est l’éternel débat dans lequel on voudrait enfermer l’histoire et la pensée et qui consiste, au nom de l’holocauste, à diaboliser toute personne non juive qui oserait prononcer le mot juif.
“On”, mais qui est donc ce “on”? Sont redoutables…. non seulement ils propulsent, mais ils diabolisent et censurent.
Finalement le ministre des anciens combattants aura tenté de faire d’une pierre trois coups : essayer d’entraver tout rapprochement franco-algérien, se venger par dépit des égards manifestés par M. Sarkozy au Maroc en torpillant l’idée d’Union méditerranéenne et bien sûr, une misérable opération destinée à un peuple qui a perdu toute illusion dans la capacité de ses dirigeants à le faire vivre dans la dignité.
Oui décidément, Leïla Aslaoui a bien raison, avec de tels bonshommes, c’est le retour à l’âge de pierre assuré!
* Merci à Scheiro d’avoir attiré mon attention ce matin sur les déclarations du ministre algérien.
27 septembre 2009
M. MOHAMMEDI