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La Trilogie (Impasse des deux palais, Le Palais du désir, Le Jardin du passé)  

27 septembre 2009

1.Lu pour vous

(Naghib Mahfuz – 1956-1957)

En recevant le prix Nobel de littérature, en 1988, le romancier égyptien Naghib Mahfuz  La Trilogie (Impasse des deux palais, Le Palais du désir, Le Jardin du passé)   dans 1.Lu pour vous td_photo (né en 1911) donnait aux lettres arabes une reconnaissance internationale. Trop tardive peut-être, cette distinction n’en honorait pas moins une œuvre de fiction exemplaire. On peut considérer ainsi que la publication de La Trilogie entre 1956 et 1957, mais dont la rédaction était achevée dès 1952, a marqué la fin d’un cycle ouvert un siècle plus tôt par La Jambe sur la jambe du Libanais Faris Chidyaq.

Avec La Trilogie, le roman arabe se trouvait désormais en demeure de prouver non plus son existence mais son indépendance, notamment par rapport à ses modèles européens. Succédant aux premières œuvres influencées par le roman historique et précédant immédiatement la rédaction du Fils de la médinaLa Trilogie représente également le point culminant de la période dite réaliste, celle qui a permis à son auteur de s’imposer sur la scène littéraire et de rencontrer le plus vaste public. (1959) avec lequel Mahfouz donne une nouvelle inflexion à son écriture, à la fois plus moderne et peut-être plus inquiète,

Une trilogie réaliste

Connus aujourd’hui sous le nom de La Trilogie, les trois romans qui retracent la destinée d’une famille cairote, de 1917 à 1945, auraient dû initialement être publiés en un seul volume. Toutefois l’unité de l’œuvre ne souffre guère d’une partition que la parenté des titres, qui renvoient aux trois quartiers de la capitale égyptienne où se déroule l’action, contribue à effacer.

Impasse des deux palais ouvre le récit en présentant une société largement dominée par la tradition, soumise aux décrets divins et au pouvoir tout-puissant des chefs de famille. Le représentant en est Abd el-Gawwad, ce bourgeois aisé qui impose aux siens toute la rigueur de sa sévérité, tout en se donnant à lui-même la liberté d’agir selon ses penchants et ses humeurs : « Quant à lui, il était on ne peut plus jaloux de sa dignité et de son autorité, ses moments de gentillesse n’étaient que fugitifs et, si de temps en temps, assis sur son divan, un large sourire s’ouvrait sur son visage à la pensée soudaine des bons moments de la soirée, il avait vite fait de se reprendre et de se renfermer. » Cependant, des changements s’annoncent dans une Égypte unie par une même ferveur nationaliste, où même les femmes participent à la revendication politique. Le premier tome s’achève ainsi avec la révolte de 1919, durant laquelle un des fils, Fahmi, trouve la mort.

Transportant son lecteur dans la seconde moitié des années 1920, Le Palais du désir place sur le devant de la scène la génération suivante, celle de Kamal, qui, sans aller jusqu’à se rebeller ouvertement contre son père, affirme progressivement son autonomie. Kamal fait partie de ces intellectuels qui s’efforcent de propager les idées modernes dans une Égypte de plus en plus travaillée par le processus de modernisation politique : malgré le soutien des grands propriétaires terriens, la royauté résiste difficilement à la dynamique de progrès incarnée par la bourgeoisie montante. De nouveau, le récit se referme sur une mort, celle du beau-frère de Kamal, Khalil Shawkat, ainsi que de ses deux fils, Othman et Mohammad.

Le troisième tome, Le Jardin du passé, est celui qui couvre la période la plus longue, de janvier 1935 à l’été 1944. Amorcée depuis le début du siècle, l’évolution de la société égyptienne devient flagrante. Le monde patriarcal d’Amina, la grand-mère, qui était décrit dans les premières pages de La Trilogie, s’est éteint ; les rapports sociaux, les paysages urbains sont définitivement autres, plus modernes mais aussi plus occidentalisés (significativement, l’achèvement de La Trilogie coïncide avec la révolution de 1952 et l’entrée de l’Égypte dans son ère républicaine). Le puissant mouvement de transformation qui parcourt cette saisissante fresque sociale est lourd de tensions et de conflits, comme en témoigne la destinée contrastée de deux petits-fils d’Abd el-Gawwad, Ahmed le communiste et Abd el-Monem qui a choisi, lui, de militer avec les Frères musulmans.

Une interrogation sur l’histoire de l’Égypte

Pour expliquer son projet littéraire, qui marque non seulement La Trilogie mais aussi toute son œuvre, Naghib Mahfuz a souvent évoqué la soirée de l’année 1938 durant laquelle il prit la décision de consacrer le reste de son existence à l’écriture, avec pour objectif suprême de contribuer à la totale reconnaissance du genre romanesque au sein du paysage culturel arabe. Une mission qui montre à quel point le peintre de l’Égypte naissant à sa modernité a toujours possédé une conscience aiguë de sa propre position historique. En effet, Naghib Mahfuz appartient à une génération de transition – celle de Kamal, fils d’Amina et du terrible Abd el-Gawwad, frère de Fahmi, le martyr du combat national, oncle des deux jeunes révoltés qui ont choisi des voies si opposées. Dans l’immense cortège de tous ses personnages, c’est en effet de Kamal que le romancier a souvent affirmé se sentir le plus proche. C’est lui qui, dans le récit, ne réussit pas totalement à marquer la coupure qui le sépare de son père, et qui donne à La Trilogie cette conclusion en demi-teinte : le constat de l’impossible unité de l’être, la persistance de l’interrogation anxieuse sur le sens de l’existence. Cette inquiétude, les œuvres postérieures de Naghib Mahfuz l’exprimeront selon des stratégies narratives qui, rompant avec l’écriture naturaliste, ouvrent ce que l’on peut appeler, à la suite de Nathalie Sarraute, « l’ère du soupçon » dans le roman arabe.

  • Yves GONZALEZ-QUIJANO
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    À propos de Artisan de l'ombre

    Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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