MOULOUD FERAOUN-Le barde de la littérature algérienne
Source : Horizon
Il y a quarante sept ans nous quittait le barde de la littérature algérienne, Mouloud Feraoun. Du haut de sa stature de normalien de l’école Normale de Bouzaréah, il repris les chemins escarpés de son vieux village de Tizi Hibel en Grande Kabylie, pour remettre ‘’Le fils du pauvre’’ au centre de l’actualité brûlante de la «question algérienne» en débat à l’ONU.
Au château Royal de Ben Aknoun, directeur des Centres sociaux qu’il était en co-parrainage avec Germaine Tillion, il fut lâchement assassiné par un commando de l’OAS en 1962. C’est dans »Le Journal » que s’exprime toute sa dimension humaine. Mouloud Feraoun est le fils d’un pauvre qui a décrit la vie de tous les fils des pauvres d’Algérie à l’époque coloniale.
Il savait que les montagnes se méritaient et qu’elles étaient loin d’être des obstacles infranchissables, contre lesquels naturellement les pluies, les vents, les éclairs, les orages et les neiges venaient briser en éclats leur colère. Les montagnes pour Feraoun, du haut desquelles on se retrouve plus près du ciel, comme le lui disait Mammeri, dans ‘’La terre et le sang’’, sont ce genre de provocations qui vous poussent à aller plus loin vers cette victoire qu’a été cette institution qui n’oublia jamais de revenir les saluer et y reposer à jamais.
Alors que le mouvement national s’acheminait sûrement mais lentement vers l’issue finale, pour l’Algérien des années 50 que fût Mouloud Feraoun, entreprendre d’écrire était en soi un engagement. Car il allait contribuer à soustraire la société algérienne astreinte et soumise au regard réducteur et intéressé des auteurs français d’alors, qui la pressentaient »comme un élément du décor à peine faite pour la charrue et les boeufs.
C’est par sa plume que le monde découvrit dans la modeste école communale de la cité Nador au Clos Salembier, les balbutiements d’un peuple en souffrance, au seuil de l’éveil politique déclamant sa liberté et son nationalisme face à l’occupant. Si Feraoun n’a pas produit beaucoup d’ouvrages, cela tient au fait qu’il ne considérait pas l’événement de l’écriture comme une fin en soi. Toute sa pensée était cristallisée autour de sa prise de conscience et de sa responsabilité en tant qu’instruit, vis-à-vis de sa société. Aussi, privilégia-t-il l’action sociale, la scolarisation et l’instruction du maximum de »fils des pauvres », alors seule issue de sortie de leur condition et de les reléguer au second collège.
Etrangement, il sera assassiné dans la cour d’un centre social un matin de mars 62, »…comme si une giclée de balles imbéciles pouvait l’avoir arraché de notre vie, sous prétexte qu’elle l’avait stupidement rayé du paysage… », alors qu’il était inspecteur des centres sociaux.
Mais pouvait-il mourir autrement que comme cela et pour cela ? »C’était le dernier hommage de la bêtise à la vertu », lui disait encore Mammeri.
9 septembre 2009
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