Il était le père du réseau des porteurs de valises
Francis Jeanson n’est plus
Celui qui avait choisi la liberté à l’autoritarisme, la résistance à l’abdication et l’humanisme aux basses visées colonialistes, a livré son dernier combat ici-bas.
Francis Jeanson, puisque c’est de lui dont il s’agit, est décédé samedi à Paris à l’âge de 87 ans des suites d’une longue maladie. Cet intellectuel français, qui avait choisi de combattre aux côtés des Algériens le colonialisme français, a été le fondateur, en 1957, du réseau des porteurs de valises qui porta son nom, « le réseau Jeanson ». Un réseau dont les membres étaient des Français qui avaient milité pour la cause de l’indépendance algérienne en participant de manière active à la lutte de libération, notamment en collectant et en transportant des fonds et des faux papiers pour les militants du FLN opérant au sein de la Fédération de France.
D’âme et de cœur, nous ne pouvions laisser tomber ce peuple car, comme lui, nous étions Algériens », disait Francis Jeanson pour qui l’engagement pour la liberté n’avait pas de frontière. Lui qui avait milité pour la libération de la France durant la Seconde Guerre mondiale ne pouvait concevoir que son pays, la France, soit l’auteur d’atrocités à l’égard d’un peuple qui réclame son indépendance. Dans son livre la Foi d’un incroyant, F. Jeanson disait que « les hommes n’existent qu’au prix de parier sur leurs propres chances d’exister ». Son engagement pour la cause algérienne semble avoir été son pari pour marquer sa différence avec l’image d’une France colonialiste et tortionnaire.
Cet intellectuel « guerrier », qui vient de prendre rendez-vous avec le repos éternel, ne pouvait rester inerte devant les dérives de la France officielle. Accusé de trahison à sa patrie pour s’être engagé avec les Algériens, F. Jeanson avait pourtant prouvé sa haute estime à sa patrie qu’il refusait de voir transformée en machine à tuer un peuple. Il avait l’âme d’un vrai résistant qui ne trahissait pas ses engagements face à un idéal de liberté. « Je ne pouvais être contre une guerre de libération », disait-il dans les colonnes d’El Watan en 1991. Et de souligner, dans Le Monde en 2001, que les questions qui s’était posées à lui et qui avaient déterminé sa position était « pourquoi faisons-nous la guerre au peuple algérien ? Au nom de quels intérêts ? ». Et de préciser dans un autre entretien, plus récent, « après un voyage et une tournée en Algérie, j’ai découvert combien les Algériens étaient méprisés par les grands colons et la situation abjecte dans ce pays ».
F. Jeanson soutient que sa vie a été une série de hasards, mais en bon philosophe qu’il était, il n’était pas homme à prendre les choses comme on les lui présentait. C’est d’ailleurs cet esprit libre qui lui dicta son parcours d’intellectuel engagé. Son parcours militant lui avait valu l’invective émanant surtout de sa famille politique, la gauche. Une gauche française qui refusait d’assumer ses erreurs dans la gestion de la guerre d’Algérie. Le nom de Jeanson est resté tabou car, comme le souligne Marie-Pierre Ulloa, « face aux tortures et aux massacres d’une guerre de moins en moins légitime, Jeanson osa briser le mur du silence dans lequel s’enfermèrent socialistes et communistes et sut incarner une attitude fidèle aux idéaux fondateurs de la gauche ».
Depuis la publication, en 1957, de son ouvrage Algérie hors la loi, Jeanson signa les lettres de son combat aux côtés de cette mauvaise conscience de la gauche française des années 1950. Il entra en clandestinité et lança une revue, Vérité Pour, afin d’expliquer la vraie mesure de son engagement et de rallier le maximum de sympathisants à la cause algérienne. Il fut condamné en 1960 par contumace lors du procès des membres de son réseau de porteurs de valises. Il n’abdiquera pas et continuera à militer avec les frères du FLN pour une Algérie libre et indépendante. Après 1962, Jeanson revient à l’engagement intellectuel et se bat encore une fois, fort du soutien de Jean-Paul Sartre, pour réintégrer la sphère intellectuelle. Il dit en 2001, dans Le Monde, au sujet du débat sur les crimes coloniaux : « Je constate que, depuis qu’on a ouvert cette boîte de Pandore, la perspective morale l’emporte sur la perspective politique. Tout se passe comme si on voulait dédouaner la politique de guerre coloniale menée pendant des années. »
Par
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Lors de la Seconde Guerre mondiale, il s’évade par l’Espagne pour fuir le STO et rejoint l’armée française de la Libération en 1943[1].
Reporter à Alger républicain en 1945, il rencontre Albert Camus et Jean-Paul Sartre et ce dernier lui confie la gérance de la revue Les Temps modernes de 1951 à 1956. Parallèlement, Jeanson crée et dirige aux éditions du Seuil la collection « Écrivains de toujours ».
À partir de 1957, au plus fort de la guerre d’Algérie, il met en pratique ses idéaux anticolonialistes en créant le Réseau Jeanson chargé de transporter des fonds à destination du FLN. Ce réseau clandestin de militants sera démantelé en 1960. En fuite à l’étranger, Francis Jeanson sera jugé par contumace en condamné en octobre 1960 à dix ans de réclusion.
Il revient en France à l’occasion de son amnistie, en 1966, et est chargé par André Malraux de diriger la Maison de la culture de Chalon-sur-Saône (1967-1971). Il participe ensuite à des expériences de « psychiatrie ouverte ».
En 1992, il devient président de l’Association Sarajevo, en soutien au peuple bosniaque, et se porte candidat sur la liste « L’Europe commence à Sarajevo » du professeur Léon Schwartzenberg pour les élections européennes de 1994.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Francis_Jeanson#Biographie
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Bibliographie
Signification humaine du rire, Seuil 1950
La Phénoménologie, 1952
La vraie vérité, suivi de La Récrimination, 1954
Sartre par lui-même, 1955
L’Algérie hors la loi, en collaboration avec Colette Jeanson, 1955
Montaigne par lui-même, Seuil / Ecrivains de Toujours 1957
Notre guerre, Editions de Minuit 1960
La Révolution algérienne, problèmes et perspectives, 1962
Lignes de départ, 1963
Lettre aux femmes, 1965
Problème le moral et la pensée de Sartre suivi de Un quidam nommé Sartre, Seuil 1965
Sartre, 1966
Simone de Beauvoir ou l’entreprise de vivre, Seuil 1966
La Foi, avec Paul Toinet, 1969
L’action culturelle dans la cité, Seuil 1973 – (ISBN 2020021900)
Sartre dans sa vie : biographie, Seuil 1974 – (ISBN 2020021161)
La Foi d’un incroyant, Seuil 1976 – (ISBN 2020043998)
Discours sans méthode, entretiens avec Henri Laborit, 1978
Éloge de la psychiatrie, Seuil 1979 – (ISBN 202005311X)
La Psychiatrie au tournant, Seuil 1987 – (ISBN 2020097516)
Algéries, Seuil 1991 – (ISBN 2020128616)
Une exigence de sens (trois conversations avec F. Jeanson), 1997 Editions Le Bord de l’eau
Sartre, Seuil, 2000
Entre-deux, entretiens avec Christiane Philip, Editions Le Bord de l’eau 2000
Notre guerre, Berg International 2001 – (ISBN 2911289358)
Quelle formation, pour quelle psychiatrie ? Vingt ans d’expérience de la SOFOR. Erès,2004. Ouvrage collectif sous la direction de F. Jeanson.
Escales, inédits, Editions Le Bord de l’eau 2008-2009
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CARNET
Le philosophe de la guerre d’Algérie Francis Jeanson est mort
NOUVELOBS.COM | 03.08.2009 | 09:41
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Le fondateur d’un réseau de soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie, et auteur de nombreux ouvrages sur Jean-Paul Sartre, s’est éteint à 87 ans.
Francis Jeanson (Sipa)
Le philosophe Francis Jeanson, fondateur d’un réseau de soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie (réseau dit des « porteurs de valise »), est mort à 87 ans, samedi soir près de Bordeaux, a-t-on appris lundi 3 août.
Auteur de nombreux ouvrages notamment sur Jean-Paul Sartre dont il était très proche, collaborateur de la revue Les Temps modernes, Francis Jeanson est mort à la Clinique d’Arès, à 45 km de Bordeaux, a précisé son fils Olivier.
La guerre d’Algérie
Francis Jeanson qui se voulait le défenseur des causes justes, s’était engagé aux côtés des combattants algériens après le déclenchement de la guerre d’Algérie, créant un réseau permettant de collecter et transporter fonds et faux-papiers pour les militants du FLN opérant en France.
Dans « Notre guerre », un livre paru en 1960 et immédiatement saisi, il s’était expliqué sur son combat, répondant à ceux qui lui reprochaient de soutenir les ennemis de son pays, qu’il défendait les valeurs de la France qu’elle même trahissait.
Jugé par contumace, condamné en octobre 1960 à dix ans de prison ferme au terme du procès de son réseau, il est amnistié en 1966. Il se tourne alors vers l’action culturelle, puis l’action sociale en milieu psychiatrique.
Les Temps modernes
Né le 7 juillet 1922 à Bordeaux (Gironde), licencié de lettres et diplômé d’études supérieures de philosophie, Francis Jeanson rejoint en 1943 les Forces françaises d’Afrique du Nord. Devenu reporter à Alger républicain en 1945, il rencontre Camus et Sartre. Ce dernier lui confie la gérance de la revue Les Temps modernes (1951-1956). Parallèlement, Jeanson crée et dirige aux éditions du Seuil la collection « Ecrivains de toujours ».
Le FLN
En 1955, il publie « L’Algérie hors la loi », qui dénonce l’échec du système d’intégration des masses algériennes et affirme la légitimité des hors-la-loi du FLN, avec lequel il prendra contact. Du militantisme de la pensée, il passe à l’action et crée deux ans plus tard le « réseau Jeanson » qui sera démantelé en 1960. Il entre alors dans la clandestinité, quittant la France pendant quelques années.
Après son amnistie, il est chargé par André Malraux de diriger la Maison de la culture de Châlon-sur-Saône (Saône-et-Loire) de 1967 à 1971.
La politique
Jeanson participe ensuite à des expériences de psychiatrie ouverte et des réseaux de réflexion pour faire sortir la maladie mentale des murs de l’hôpital.
Engagé jusqu’au bout, il est président de l’Association Sarajevo en 1992 et candidat sur la liste « L’Europe commence à Sarajevo » du professeur Léon Schwartzenberg pour les élections européennes de 1994.
Son œuvre
Francis Jeanson est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages, dont plusieurs consacrés à Jean-Paul Sartre, notamment « Sartre par lui même » (1955) et « Le problème moral et la pensée de Sartre » (1965)… mais aussi à des philosophes comme Montaigne.
On lui doit également « La Foi d’un incroyant » (1976), « Eloge de la psychiatrie » (1979), « Algéries » (1991), « Conversations privées 1974-1999″ (2000).
(Nouveobs.com avec AFP)
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Disparition
Francis Jeanson, une vie consacrée à l’exigence du sens
– Le philosophe Francis Jeanson est mort à 87 ans, samedi soir dans la clinique d’Arès, en Gironde. Auteur de plus d’une vingtaine d’ouvrages, Francis Jeanson était célèbre pour son soutien à la cause FLN durant la guerre d’Algérie avec la création du réseau éponyme des “porteurs de valises”.
Il y avait une trahison (…) des valeurs essentielles sur lesquelles nous pensions qu’était fondée la République française ». Toute sa vie, Francis Jeanson revendiquera le droit de lutter pour une cause juste. Mais c’est surtout pour son action au côté du FLN, pendant la guerre d’Algérie, alors que la majorité de la population française « préférait s’en remettre aux dirigeants », qu’il marquera l’Histoire.
Jeanson est né en 1922 à Bordeaux. Après avoir terminé ses études de lettres et de philosophie, et alors qu’il n’a que 19 ans, il fuit le STO et rejoint, en 1943, les forces françaises libres d’Afrique du Nord. Durant son séjour algérien, il rencontre Camus et Sartre (auquel il consacrera plusieurs livres) et devient reporter pour le journal communiste d’Alger. Après la guerre, Sartre lui confie pendant cinq années la revue des Temps Modernes (1951-1956). Philosophe reconnu et amoureux de la justice, c’est tout naturellement qu’il s’engage aux côtés du peuple algérien durant la guerre d’indépendance en créant un réseau dit de « porteurs de valises » qui permet de financer le FLN. Il publie aussi Notre guerre, violent ouvrage où il dénonce la perte des valeurs françaises dans un enracinement colonial vide de sens. Poursuivi par la Droite gaulliste (UNR), décrié dans les rangs de la Gauche (SFIO et PCF), Jeanson entre dans la clandestinité en 1960, tandis qu’avec des membres de son réseau il est condamné par contumace à dix ans de prison. Après son amnistie en 1966, il se tourne vers l’action culturelle : il participe notamment à La Chinoise, de Jean-Luc Godard, et à des spectacles théâtraux. Enfin, il s’engage dans l’action sociale en s’engageant pour la lutte contre les maladies mentales. Son dernier combat sera pourtant politique puisqu’il défendra la paix en ex-Yougoslavie durant les élections européennes de 1994, en se présentant aux côtés du professeur Schwartzenberg. Il est mort samedi, à Arès (33), à l’âge de 87 ans.
http://www.telerama.fr/monde/francis-jeanson-une-vie-consacree-a-l-exigence-du-sens,45726.php
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