Histoires vraies
Portrait détestable (3e partie)
Résumé de la 2e partie n Marie est de retour en France où la famille noble des Sénonnes refuse de l’adopter. Elle crie au scandale…
Dès qu’ils ont eu connaissance de la liaison d’Alexandre et de Marie la drapière, les Sénonnes ont pris leur plus belle plume pour mettre leur artiste romain en garde. Pierre a écrit à son frère, et Auguste, frère du martyr de la Révolution, s’en est mêlé aussi. On dit que les Bretons sont têtus. En tout cas Alexandre a répondu aux mises en demeure de ses parents par l’annonce… que Marie était devenue vicomtesse de Sénonnes. D’ailleurs, à Rome, Alexandre a fait de son épouse un agent actif qui travaille pour le retour de Louis XVIII.
La distance entre Rome et la Bretagne apaisait un peu la colère des Sénonnes. Mais quand Alexandre et son épouse arrivent à Paris, la colère de la famille remonte à la surface.
«Le Roi a nommé Alexandre secrétaire de la Chambre !
— Avec 12 000 francs d’appointements ! Il l’a fait chevalier de la Légion d’honneur ! Membre de l’Académie des Beaux-Arts !
— Attendez, vous ne savez pas tout : Alexandre vient d’être nommé secrétaire général des Musées royaux. A 15 000 francs d’appointements ! Et il est logé au Louvre même, avec sa… avec la… Trastévérine !»
Les Sénonnes s’étranglent, et les mots leur manquent. Trastévérine n’est pas un compliment. Le Trastevere n’est pas un quartier élégant de Rome, même à l’époque. Les Sénonnes se plaisent à inventer une toute nouvelle «biographie» pour la belle Marie. Pas du tout à son avantage.
En 1818, Alexandre fait un voyage officiel qui l’amène… à Sénonnes. Avec son épouse. Ce ne sont que fêtes, réceptions officielles. Une cérémonie se déroule dans l’église du village, devant le cénotaphe en marbre blanc où l’on peut voir les profils des deux martyrs de 1794.
Mais tous ceux qui assistent à cet émouvant retour de l’enfant du pays sont obligés de constater l’absence totale et unanime de tous les autres membres de la famille. Ni Pierre, le frère, ni Auguste, l’oncle, ni la tante, ni les cousines. Marie saura s’en souvenir.
Retour à Paris, où l’étoile d’Alexandre continue à monter au firmament. «Sa Majesté vous nomme secrétaire général du ministère de la Maison du Roi.» Ceci amène Alexandre à faire fonction de ministre pendant la courte guerre d’Espagne.
Charles X succède à Louis XVIII. Alexandre devient maître des requêtes au Conseil d’Etat, intendant de la Liste civile, commandeur de la Légion d’honneur. Désormais, il est l’un des favoris du roi. Il se lance dans les affaires, spécule dans l’immobilier. Marie Cardoz est au sommet de l’échelle sociale. Quel destin superbe ! Jusqu’où montera-t-elle ?
En 1828, hélas, Alexandre voit mourir sa chère Marie. Elle a quarante-cinq ans, et elle est encore belle. Décidément, les malheurs vont accabler Alexandre. Après la mort de son épouse, ce sont ses spéculations immobilières qui s’avèrent malheureuses. Les huissiers apparaissent : les meubles précieux, les bibelots disparaissent (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
10 juillet 2009
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