Histoires vraies
Avis de décès (3e partie et fin)
Résumé de la 2e partie n Le 27 mai 1970, Edwin Ramundsen meurt, mais dans son lit et non pas écrasé par un poids lourd comme il le prédisait…
Un des voisins, accompagné d’un employé des pompes funèbres, se rend au cimetière et s’enquiert de la localisation de la concession :
— C’est dans l’allée 18, le carré H. Mais vous allez être surpris.
Le gardien du cimetière disparaît avant que les deux autres hommes aient pu lui demander de quelle surprise il peut s’agir…
— Voyons, nous sommes sur l’allée 18, et voilà le carré H.
L’employé des pompes funèbres s’exclame :
— Ah mais oui, j’y suis, c’est bien du célèbre Edwin Ramundsen qu’il s’agit… J’ai entendu parler de cette histoire. Tenez, nous y voilà. Regardez vous-même.
Le voisin s’approche de la pierre tombale, taillée dans un beau granit brillant. Tout autour une herbe verte soigneusement entretenue. Une inscription en lettres d’or figure sur la stèle. On peut lire : «Edwin M. Ramundsen, né le 14 mars 1897, mort le 27 mai 1970.»
— C’est incroyable, nous sommes le 28 mai. Ramundsen est mort le 27. Comment la pierre tombale peut-elle être déjà en place avec la date exacte de sa mort ?
— Ah ! c’est la question que toute la ville s’est posée. Quand il a fait ériger cette pierre tombale il y a une vingtaine d’années, tout le monde s’est dit qu’il avait un petit grain. Ou bien qu’il était doté d’un sens de l’humour macabre… Mais il n’a fait aucun commentaire. Il a commandé la pierre. Il a surveillé la mise en place et voilà tout.
— Mais il n’y a pas que cela, on raconte que feu Edwin Ramundsen avait parié avec son médecin personnel qu’il serait mort à cette date exacte.
En effet, le matin de sa mort, Edwin Ramundsen, certain de son destin, s’est rendu à sa banque et il a fait effectuer un virement bancaire au crédit de son fidèle médecin, le docteur Molmonar.
Après ce décès dont la date avait été prévue avec tant d’exactitude, la petite communauté qui s’intéresse à Edwin Ramundsen se pose des questions sur cette prémonition incroyable.
Cependant, un détail retient l’attention. En suivant le convoi funèbre de son client, le docteur Molmonar, un peu vexé d’avoir eu tort, parle à voix basse avec un autre ami du regretté Edwin :
— Il m’a fait un virement bancaire de 1 000 couronnes. Il est bien mort à la date prévue. Bon ! Mais là où il s’est complètement trompé, c’est dans la manière de mourir. Je me souviens parfaitement de ce qu’il m’avait dit à l’époque. Il se voyait en train de lire l’Arbetet tout en marchant dans la rue. Et un camion surgissait avant de l’emboutir. Il m’avait dit qu’il mourrait écrasé, sans avoir le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Or, il est mort chez lui, d’une rupture d’anévrisme. Pas le moindre poids lourd en folie dans sa fin…
— Oui, c’est curieux en effet. Est-ce que ça voudrait dire, par hasard…
L’ami qui entre dans le cimetière en compagnie du docteur Molmonar n’a pas le temps de terminer sa phrase. Un camion survient. Le chauffeur actionne son avertisseur. Il se passe quelque chose d’anormal. Les témoins comprennent immédiatement : les freins ont lâché et le chauffeur cherche à prévenir ceux qui pourraient se trouver sur sa route. Mais il ne parvient pas à interrompre la course folle de son véhicule. Le poids lourd percute de plein fouet le corbillard qui emmène le cercueil du défunt Edwin Ramundsen. Sous la violence du choc, le cercueil explose, projetant la dépouille de l’homme qui était tellement certain de la date de sa mort. Les témoins horrifiés qui voient le corps gisant sur le trottoir sont tous d’accord : «On aurait dit qu’il avait une sorte de sourire ironique.»
D’après Pierre Bellemare
28 juin 2009
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