Le café… et le lait (2e partie et fin)
Résumé de la 1re partie n Un homme jaloux de la confiance que le roi porte à son cahouadji, le dénigre aux yeux de ce dernier quant à son hygiène.
Le Roi fut bouleversé. C’était donc pour cela que ce cahouadji, jouant la modestie, habitait hors les murs, de façon à éviter tout contact avec les gens de la ville qui auraient pu surprendre l’horrible secret… Le souverain savait que, dès la prière de l’aurore, au premier appel du muezzin, son serviteur se présentait le premier devant les gardes de la Porte de la Ville pour venir prendre son service au Palais.
Il appela ses chaouch (serviteurs) et leur dit :
«Demain matin, vous vous saisirez de l’homme qui se présentera le premier devant la Porte de la Ville et vous irez le pendre !»
Or, il se trouva que notre envieux qui convoitait la place du cahouadji et pensait bien que celui-ci serait condamné à l’aube, alla se poster près de la Porte de la Ville afin d’être le premier à se présenter au Palais dès l’exécution. Il y arriva même avant le cahouadji.
Et ce fut lui qui fut pendu.
Lorsque, ce matin-là, le Roi vit arriver son cahouadji dans toute sa sérénité et la blancheur de son hamama immaculé, il fut stupéfait. Le bon serviteur chantonna comme à l’habitude :
«Voici le café… le café et le lait !…
Le Roi, cette fois, prêta attentivement l’oreille :
Vous tous saluez le Prophète aimé !
Que celui qui creuse contre son frère un puits
Soit le premier à y être englouti !… »
Les yeux du Roi commençaient à se dessiller.
Il appela ses gardes pour leur demander s’ils avaient exécuté le premier passant se présentant à la Porte de la Ville. Sur leur réponse affirmative, le Roi se rendit au bois de justice et reconnut le calomniateur. Il revint et dit à son serviteur :
«Sois sincère ! Explique-moi pourquoi tu voiles le bas de ta figure avec ton hamama ?»
Et le disciple de pureté répondit :
«Sire, lorsque je cherche des brindilles dans les bois pour allumer votre feu, je peux froisser de petites herbes dégageant quelque odeur et aussi salir mes mains ou mon visage de cendre ou de noir de fumée.
«Ne convient-il pas que votre serviteur soit aussi blanc que le lait qu’il vous sert, que la prière du Prophète, et que la justice que Dieu vous inspire ?»
Tiré des Contes mystérieux d’Afrique
du Nord de Jeanne Scelles-Millie
28 juin 2009
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