RSS

“J’écris avant tout pour le plaisir”

12 juin 2009

Non classé

  • Djamel Mati
    “J’écris avant tout pour le plaisir”

D’un roman à l’autre, l’écrivain continue de scruter les métamorphoses de la société contemporaine.
La quête de soi est également présente dans les livres de Djamel Mati. Ici sa perception de l’écriture.

La Dépêche de Kabylie : Comment êtes-vous venu à l’écriture?

Djamel Mati : J’aimerais vous répondre : par un enchaînement hasardeux… mais une chose est sûre, c’est que je ne me suis pas réveillé un matin en me disant : tiens, aujourd’hui, je vais commencer à écrire un roman… J’imagine que le premier acte d’écrire obéit à une accumulation d’émotions faites de plaisirs et d’angoisses. Puis…un jour, une nuit, lorsque l’encrier est sur le point de déborder, il faut vite tremper la plume pour empêcher ce trop plein de couler ! C’est en tout cas ce qui a dû m’arriver. En revanche, j’ai toujours été passionné par la littérature et l’écriture, j’ai gribouillé pas mal de fables ou de bribes d’histoires que je faisais lire à mes proches, mais sans suite. Mon premier ouvrage est un essai sur les dangers liés à l’informatique, publié à l’Office des publications universitaire en 1999. En décembre 2003, Sibirkafi.com sortait aux éditions Marsa ; en septembre 2004, Fada, fatras de maux, aux éditions APIC ; en septembre 2005, Aigre-doux, toujours aux éditions APIC. Maintenant, je ne conçois plus ma vie sans écrire. Drôle et géniale comme sensation, d’autant plus que j’écris avant tout pour le plaisir (même si mes écrits sont parfois caustiques) et si cette passion est partagée avec d’autres, je ne peux que m’en réjouir. Ce qui est grisant pour moi, c’est que j’écris les yeux fermés. Je me fais mon cinéma dans ma tête avant de le traduire sur la feuille blanche. En fin de compte, je pense que nous avons tous un écrivain qui sommeille en nous… un jour ou une nuit, il risque de se réveiller ! La suite n’est que captations de lumières, de mots, de musiques, d’objets, de souvenirs, etc. qui catalyseront l’inspiration. L’écriture obéit alors à un processus complexe et inexplicable où l’émotivité tient une
grande place. 

Quelles sont les thématiques principales de votre œuvre ?
ll Je me concentre pour l’instant sur la recherche de l’humain avec comme décor la société contemporaine, une société avec ses faiblesses et ses forces, ses rapports avec le réel et avec l’imaginaire, ses tiraillements entre ce qui est mal et ce qui est bien. En fait, je n’ai rien inventé, les thèmes que j’aborde existent depuis toujours, ce sont : la quête de soi, la recherche de l’amour, de l’absolu, de la liberté, de l’idéal, le combat que se livrent le bien et le mal, mais tout ceci est dépeint dans la dérision et le tragique avec un style d’écriture qui reflète mon état d’esprit. Pour moi l’imaginaire n’est que la restitution d’un réel en plus vrai avec en plus la liberté de pousser même plus loin que la réalité, alors, les champs de l’écriture deviennent immenses, inépuisables, car je crois que le réel est plus riche lorsqu’on le regarde à travers des prismes. C’est une démarche qui peut paraitre paradoxale, mais nécessaire à mes réflexions, où l’imaginaire doit séduire pour nous conduire hors des frontières que nous impose la réalité. La magie de l’écriture peut donner cette originalité. Pour mes trois romans “Sibirkafi.com, Fada, Fatras de maux et Aigre-doux» certains médias ont dit, qu’ils obéissaient à un aucun modèle d’écriture des romans produits depuis la décennie écoulée. Le lieu, le temps ainsi que les séquences narratives dans ces trois histoires sont complètement déconnectés de la réalité tout en décrivant cette réalité même. En effet, la mise en abime dans le jeu d’écritures est de prendre le lecteur au piège d’un texte. C’est le piège du tangible et du leurre. Il se joue sur un rapport très étroit (réel/irréel, attente/crainte) pour lequel la feintise est plus qu’une nécessité mais devient un style. La confrontation entre le ludique et le dramatique est constante dans mon écriture actuelle. Je me plais de conjuguer avec cette antinomie. Cette dualité finit par mener vers un monde de goguenardise. Pour interpréter mes univers, je construis des structures mettant en jeu des oppositions symboliques, souvent binaires : espace clos et ouvert,  réalité et virtualité, évènements ludiques et dramatiques en faisant abstraction du temps et de l’espace. Pour concilier ces contradictions, j’ai recours à la dérision, la satire et aussi l’humour afin de dérider des situations dramatiques tout en insistant sur leur gravité dans la métaphore. Ceci permet de donner plus de relief soit au ludique soit au tragique. C’est aussi une manière biaisée de décrire une émotion ou un évènement important. Cela donne, sur le vif, une vision décalée ou plutôt bancale de la chose, mais après sa lecture elle se redresse pour reprendre un sens plus profond, plus percutant… Un peu comme si j’observais les personnages, les évènements et les lieux, à la fois à travers un prisme et à partir d’une vision réelle. Pour moi, la fiction devient un exutoire où je me permets (presque) tout. Le modèle narratif se doit d’impliquer le lecteur directement dans l’histoire et lui amener plus d’émotivité dans sa lecture. Le «je» du narrateur dans ce cas-là sort de la virtualité et devient réel puisqu’il possède maintenant une identification (celle du lecteur) ! La somme des deux «Je» s’enracine dans une réflexion qui dépasse l’individuel pour rejoindre les comportements collectifs qui orientent, de l’extérieur comme de l’intérieur, la question de la frontière entre l’imaginaire et le vécu. La fiction est à prendre comme une représentation d’un monde réel qui avec l’opération de lecture fait passer l’imaginaire de l’autre coté du miroir. Comme si l’imaginaire se mire dans la réalité. ہ partir de ce moment, on finit par croire à ce qu’on écrit ou ce qu’on lit. 

Comment voyez-vous la littérature algérienne dans ses trois langues ?
ll Le romancier, contrairement à l’essayiste, doit d’abord être un producteur d’émotions. Le seul critère qui prime dans la littérature est celui de la qualité ce n’est sûrement pas celui de la langue utilisée. La langue d’écriture est un «outil» chez l’écrivain et plus un pays possède de langues plus il produira de la littérature. Donc, la pluralité des expressions écrites ne peut qu’être bénéfique à la littérature algérienne, à condition de ne pas tomber dans les faux problèmes des clivages linguistiques qui desservent le savoir en général. Chacun est libre d’écrire dans la langue qu’il a choisie pour plusieurs considérations. Et c’est à juste titre, car la langue n’a jamais constitué un handicap en soi. Il nous faut éviter ce nœud gordien qui risque d’étrangler une partie de notre culture. Cependant, toutes les passerelles entre les trois langues doivent exister afin de donner plus de lisibilité à la littérature algérienne dans ses trois composantes. Ainsi, la résultante des trois vecteurs linguistiques (arabe, berbère et français) ne peut être que positive. Nous avons besoin de ces trois langues pour affronter la modernité et nous affirmer dans le futur. C’est avec cette pluralité que nous pouvons développer notre richesse culturelle. Quant à la production littéraire, j’estime qu’elle amorce (lentement mais sûrement) une courbe ascendante, mais pour l’aider dans son ascension, il faudrait renforcer et structurer l’environnement dans lequel elle évolue et qu’elle puisse atteindre une reconnaissance véritable. Actuellement, la littérature algérienne dans ses trois langues aborde un virage assez intéressant, à partir des années 2000 nous sommes passés d’une écriture de revendications puis de
témoignages à une écriture des imaginaires où le «Je» de la narration s’installe comme référant principal autour duquel tout l’univers romancé gravite. La narration jette un regard dévié sur le vécu. Elle raconte le sérieux de la vie d’une autre façon. Chaque écrivain adopte sa propre vision et forge son propre style. L’écriture actuelle me parait plus libérée dans le sens où elle n’obéit qu’à son auteur.  Durant les années de la révolution nationale et même, après, l’écriture est quasiment révolutionnaire et revendicatrice. Elle a tout de même imposé une forme d’écriture qui laissera sa trace, celle d’une «quête», l’indépendance nationale. Nous trouverons cette soif de quête chez les générations à venir : quête de la liberté d’expression et d’تtre (1990-2000) et enfin la quête du Soi et de l’inaccessible pour la littérature à partir des années 2000 — le lit de la rivière est toujours le même, seules les eaux qui le traversent sont différentes, mais elles sont toujours tumultueuses.

Quels sont vos projets d’écriture ?

ll Je viens de terminer, “On dirait le Sud  qui est le troisième et dernier volet de la trilogie, “Les élucubrations d’un esprit tourmenté” (sibirkafi.com, Aigre-doux et On dirait le Sud). Le roman sera publié à la fin du mois de Ramadhan. En ce moment, je suis sur une autre histoire, Les yeux de Yoko, et j’ai aussi deux autres manuscrits en attente, La secte des éteignoirs et Les liaisons virtuelles. Le reste est à l’état embryonnaire…

 Propos recueillis
par Farid Ait Mansour

http://www.depechedekabylie.com/popread.php?id=28171&ed=1311

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

Voir tous les articles de Artisan de l'ombre

S'abonner

Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir les mises à jour par e-mail.

Les commentaires sont fermés.

Académie Renée Vivien |
faffoo |
little voice |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | alacroiseedesarts
| Sud
| éditer livre, agent littéra...