Les Amants de Padovani
Roman – Éditions Dalimen, Alger, 2004
Info Soir 21 septembre 2004
Dahmane et Amélie, un amour pathétique
Par Fethi A. Evocation
Youcef Dris, auteur des Amants de Padovani, nous plonge irrésistiblement dans un maelström de réminiscences passionnelles
grâce à une écriture incisive, concise et précise.
Son roman, à la fois émouvant et déchirant, nous interpelle au
détour d’une rue, d’une ruelle ou d’une petite venelle du populeux
quartier de Belcourt et de la rue d’Isly en ce début du XXe siècle.
Le roman de Youcef Dris nous rappelle à l’ordre pour méditer sur
l’amour idyllique de Dahmane et d’Amélie. Un amour fou, terrible et
envahissant, qui finira par imposer sa raison d’être dans une Algérie
stigmatisée par un siècle de colonialisme nourri à la mamelle de
l’indigénat scélérat. Comme dans un mauvais conte de fées, Dahmane
quitte son village de Kabylie, à la mort de son père en compagnie de
sa mère et de sa grand-mère Fatma, pour Alger. Ce fut un tournant
décisif dans la vie de Dahmane qui va alors vivre des moments
intenses auprès d’Amélie. Il ne la quittera plus, jusqu’à la mort
tragique de celle qui allait porter plus tard son enfant.
Ce fut d’abord «l’apprentissage» du petit Dahmane des us et
coutumes des «roumis» auprès de la famille de maître Démontes, qui
habitait la rue d’Isly. Acculé par sa fille Amélie, Me Démontes
inscrira «Dédé» à l’école maternelle, primaire et secondaire,
toujours en compagnie d’Amélie. Ensemble, ils décrochent le
baccalauréat dans les année trente.
Et c’est le basculement. Vacances à St-Raphaël et à Aix-en-
Provence, chez les grands-parents d’Amélie, qui accueilleront
le «petit indigène», ami indéfectible de leur petite-fille. A St-
Raphaël, c’est l’éclatement au grand jour de l’amour entre Dahmane et
Amélie.
Retour à Alger et vacances prolongées à la villa de Me Démontes,
à Pointe Pescade. Les sorties de Dédé et d’Amélie à la plage Padovani
font déjà jaser les pieds-noirs.
Sombre histoire pour une pathétique liaison d’amour ardent entre
l’«indigène» et la pied-noir. Ce sera le commencement de la fin, sur
fond d’apartheid colonial.
La grand-mère de Dahmane est impitoyablement chassée de son
poste de servante par Me Démontes, au bout de quinze années de bons
et loyaux services. Dahmane, injustement accusé de meurtre, est jeté
en prison par le père d’Amélie. Amélie, enceinte, est en exil forcé à
St-Raphaël où elle mourra en donnant naissance à un garçon !
Le roman de Youcef Dris est ponctué de scènes insoutenables sur
cette période précise de l’entre-deux guerres. Le lecteur est assuré
de recevoir une charge émotionnelle incommensurable.
Les Amants de Padovani, un roman à lire absolument.
F. A.
11 juin 2009
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