Voitures folles (3e partie et fin)
Résumé de la 2e partie : Fort aimablement, l’assureur de Gaston le met en garde en lui disant : «Deux accidents de voiture en 15 jours, alors gare au troisième.»
Moins d’une semaine plus tard, Gaston et Yvette sont dans le jardin qui précède leur pavillon. Ils sont penchés sur les plates-bandes, occupés tous les deux à arracher les mauvaises herbes qui ont profité des vacances pour pousser en tout sens.
Soudain, un bruit de tôle froissée les fait sursauter :
— Yvette, tu as entendu ?
— Et comment ! Ne t’en fais pas : la foudre ne tombe jamais deux fois au même endroit !
— La foudre, c’est possible mais en tout cas, ça vient du bout de la rue ! Où as-tu garé la bagnole en revenant du marché ?
— Attends : elle est rue Froissard, de l’autre côté. Mais non, je l’avais garée rue Froissard, mais je suis repartie parce que j’avais oublié d’acheter du radis noir.
— Et alors, après le radis noir, où t’es-tu garée, bon sang ?
Yvette hésite :
— En revenant du radis noir… eh bien, je… me… suis… mise… au bout de notre rue. Même que je mordais un peu sur le passage piétons.
— Oh, bibiche, va voir toi-même. J’ai l’intuition que c’est encore notre Peugeot qui en a pris un coup dans l’aile. Quelque chose dans le bruit de la tôle froissée. A force, je finis par reconnaître le cri de ma Peugeot quand elle se fait tamponner. Je n’ai pas le courage d’y aller…
Yvette, sans quitter son chapeau de paille, sort dans la rue. Elle a toujours son tablier, ses gants et son sécateur à la main. Gaston, lui, se précipite dans la cuisine et se verse un grand verre de remontant en marmonnant :
— Si c’est ma bagnole, ça va m’aider à supporter le choc. Si elle est indemne, ça sera une manière de fêter ça…
Quand Yvette franchit à nouveau la grille du pavillon, Gaston comprend tout de suite. Il lui semble même que le grincement de la grille est plus sinistre qu’il ne devrait :
— Ne dis rien, j’ai compris ! On y a encore eu droit !
Yvette se laisse tomber sur une chaise de jardin :
— Oui, c’était bien la nôtre. Et, tiens-toi bien mon chéri. Tu ne vas pas le croire !
— Croire quoi ? C’est pire que les autres fois ? Il y a des morts ? Des blessés ?
— Mais non, ni morts ni blessés. Comme à Trouville, comme à Sainte-Radegonde, c’est encore une voiture qui s’est mise à reculer et qui est venue nous emboutir en marche arrière. Sans personne à l’intérieur. Elle a traversé la rue et elle est venue directement nous percuter. En plein dans le capot. D’ailleurs, le réservoir doit être percé. Il y a du liquide qui coule en dessous.
Cette fois, le propriétaire est vite identifié, c’est un voisin. Le constat est heureusement fait en bonne et due forme : sinon, l’assureur aurait trouvé cela bizarre.
Mais la grande question reste : s’agit-il d’une malédiction de sainte Radegonde ou bien la Peugeot est-elle née sous une mauvaise étoile ?
D’après Pierre Bellemare
6 juin 2009
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