L’épopée de Djazia (35e partie)
Par K. Noubi
Résumé de la 34e partie : Djazia veut retourner auprès de sa famille mais son époux, craignant qu’elle ne revienne plus, refuse. Surtout que cette année-là, les Zénètes n’ont pas livré de blé aux Banu Hilal.
Elle a beau supplier Ben Ali Chérif, celui-ci refuse de la laisser partir.
— Je sais que tu m’as épousé à contrecœur, et que c’est ta tribu qui t’y a forcée. Tant que je lui livrais du blé et des bêtes, elle t’obligeait à rester avec moi, mais maintenant que je n’ai rien à offrir, elle voudra te reprendre !
— Je veux juste revoir les miens !
— Pas question, tranche Ben Ali Chérif.
Cependant, Djazia connaît la passion de son époux pour le jeu dit du sig : c’est une sorte de jeu d’échecs, qui se joue à deux ou plusieurs joueurs. Le jeu consiste pour chacun de faire entrer ses pions dans les cases de l’autre. Le vieux chef a proposé à plusieurs reprises à Djazia de jouer avec lui mais elle refusait, trouvant ce jeu débile. Aussi Ben Ali Chérif est-il étonné quand elle vient lui proposer une partie de sig.
— Toi jouer au sig ? dit-il.
— Tu as peur que je te batte ? répond-elle.
— Non, dit-il, mais je croyais que tu méprisais ce jeu !
— Aujourd’hui, je veux me mesurer à toi !
— D’accord, dit Ben Ali chérif, mais celui qui gagnera demandera à l’autre de faire ce qu’il voudra.
— J’accepte, dit Djazia.
Ben Ali Chérif, tout content de montrer à son épouse hilalienne sa supériorité va chercher le jeu et le pose devant elle.
— Jouons, dit-il.
Ils jouent. Ben Ali chérif gagne la première partie. Il exulte :
— J’ai gagné, j’ai gagné !
Djazia sourit ;
— Oui, tu as gagné, exige de moi ce que tu voudras !
En fait, la jeune femme l’a laissé gagner exprès.
— Je veux, dit Ben Ali chérif que tu te dénudes devant moi !
Djazia est son épouse mais il ne l’a jamais vue nue, la jeune femme refusant, par pudeur, de se déshabiller devant lui.
— C’est une chose que tu ne voudrais pas faire ? demande Ben Ali Chérif.
— Oui, mais tu as gagné, et tu as le droit de tout exiger. Si j’avais gagné, j’aurais exigé aussi quelque chose qui t’aurait déplu !
Elle se lève, ôte ses vêtements. En même temps, elle déroule sa chevelure : elle est si longue qu’elle la couvre entièrement, de la tête aux pieds de sorte que son époux ne peut voir que ses orteils !
— Tu triches, dit le mari, furieux !
— Tu m’as demandé de me déshabiller pas d’ôter mes cheveux !
— Alors, j’exige une autre partie, et cette fois-ci je serai plus précis dans ma demande !
— J’accepte, dit Djazia, en souriant. (à suivre…)
K. N.
4 juin 2009
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