Les deux sœurs
Une mère avait deux filles. Elle préférait l’aînée, qu’elle favorisait constamment. Un matin, elle envoya la puînée au fleuve pour laver une calebasse.
La petite obéit et partit aussitôt. Arrivée au bord du fleuve, elle rencontra un génie qui avait pris l’apparence d’une vieille femme.
— Peux-tu m’aider à remplir ma jarre ? lui demanda la vieille femme.
— Oui, dit l’enfant.
Dès que la jarre fut pleine, la petite fille lava sa calebasse et voulut rentrer chez elle.
Mais la vieille femme la retint et lui offrit un œuf.
— En chemin, lui dit-elle, des oiseaux vont t’insulter et te conseiller de te débarrasser de cet œuf. Surtout ne leur réponds pas et veille à ne pas casser l’œuf avant d’arriver en vue de ton village. Si tu m’écoutes, tu n’auras pas à le regretter.
— Bien, dit la petite fille.
Et elle partit. Elle rencontra effectivement des oiseaux qui l’insultèrent.
— Brise ton œuf, lui dirent-ils, car il est maléfique.
La petite fille refusa de les écouter et poursuivit rapidement son chemin. Arrivés près de son village, elle trébucha contre une pierre et elle tomba. L’œuf lui échappa et se brisa. Aussitôt, un troupeau de bétail apparut, qui la suivit jusqu’à sa case.
— Où as-tu trouvé tous ces animaux ? demanda sa mère avec surprise.
La petite lui expliqua ce qui s’était passé. La mère voulut que sa fille aînée fasse de même. Elle lui demanda donc de se rendre au fleuve pour y laver à son tour une calebasse. L’aînée protesta, prétendant que le fleuve était loin et qu’elle n’aimait pas marcher. Comme sa mère insistait, elle finit par obéir.
Arrivée au fleuve, elle rencontra elle aussi la vieille femme.
— Je suis âgée, lui dit celle-ci. Peux-tu m’aider à remplir ma jarre ?
— Débrouille-toi toute seule, répondit la fille, car je suis fatiguée.
La vieille femme insista.
— Ne m’ennuie pas, reprit la fille.
— Tu n’es pas très serviable, constata la femme. Mais je vais quand même te faire un cadeau.
Et elle lui tendit un œuf.
— Prends bien soin de ne pas le casser avant d’arriver chez toi, conseilla-t-elle.
— Oui, vieille folle ! répondit la fille avant de s’en retourner.
Sur le chemin, quelques oiseaux l’insultèrent. La fille leur répondit de la façon la plus vulgaire. Elle s’emporta et leur lança l’œuf pour les chasser. L’œuf se brisa et, des bêtes féroces en surgirent aussitôt. Elles se jetèrent sur la jeune fille et la dévorèrent rapidement.
Il ne resta d’elle que son bracelet. Sa mère le retrouva le lendemain sur le sol. La vieille femme l’attendait à cet endroit. Elle l’aborda et lui dit qu’elle avait été témoin du drame. Elle lui raconta ce qu’elle avait vu, mais elle ne lui expliqua pas pourquoi sa fille avait subi ce triste sort.
Contes du Niger Jean Muzi
29 mai 2009
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