Exercice 2 : la construction des axes de lecture :
Autour de la problématique que vous aurez choisie, l’axe de lecture est la direction que vous ferez prendre à votre commentaire. Au nombre de deux ou trois, ces axes constitueront les différentes parties de votre devoir. C’est votre lecture analytique qui vous les fera découvrir, autour de vos observations les plus récurrentes.
Jean Giono, Que ma joie demeure (1934)
(A la ferme des Jourdan, Marthe, Bobi et Jourdan viennent de construire un magnifique métier à tisser. Arrive Barbe, une vieille parente, qui, saisie d’admiration, se met aussitôt au travail).
La navette volait d’elle-même, sans efforts. Elle se posait d’un côté dans la paume droite. La main ne se refermait pas et la navette s’envolait toute seule vers la paume gauche, comme un oiseau qui se pose et repart.
Ils s’étaient approchés tous les trois pour la regarder travailler. Ils voyaient l’étoffe se construire sous le peigne et augmenter de moment en moment comme une eau qui s’entasse dans un bassin.
Et Barbe se mit à chanter. On n’entendait pas toutes les paroles. On entendait : « Aime joie, aime joie » ; puis le bruit claquetant des baguettes de la navette, de la barre, le tremblement sourd des montants, puis : « Aime joie, aime joie!
- Qu’est-ce que vous chantez ? cria Marthe.
- Quoi ? cria Barbe.
- La chanson.
- Oui », cria Barbe.
Mais elle continua à chanter et à travailler toujours pareil.
Bobi et Jourdan se reculèrent. Ils étaient enivrés comme des alouettes devant cette vieille femme sèche qui tremblait sans arrêt dans un halo de petits mouvements précis et par ce mot de joie, joie, joie, qui sonnait régulièrement dans le travail comme un bruit naturel. Ils essayèrent de sortir mais ils rentrèrent. Ils essayèrent de s’occuper à emmancher une hache. Ils ne pouvaient plus réussir à avoir la tête paisible. Ils étaient saouls. On aurait pu les prendre tous les deux sous un chapeau. Marthe avait eu moins de force. Elle regardait ; elle écoutait. Elle était émue
tout doucement par les mêmes gestes que Barbe, comme quand le vent frappe d’un bord l’étang de Randoulet et que sur l’autre bord la vague bouge.
© Grasset
La lecture analytique de ce texte aurait pu donner au fil de ses étapes les observations suivantes :
- les imparfaits indiquent une durée répétitive aux limites imprécises
- la description porte sur la technique séculaire du tissage (termes techniques, gestes précis de la tisseuse)
- la scène est vue à travers des yeux de paysans
- trois personnages spectateurs regardent et écoutent
- les témoins sont subjugués (ivresse des hommes, émotion de Marthe)
- le travail produit une véritable fusion entre le métier à tisser et la tisseuse (la navette et la main, les bruits mécaniques et le chant)
- la vieille femme est entourée d’un halo comme un personnage surnaturel
- la chanson prend un tour incantatoire; elle n’est pas comprise par les spectateurs
- le texte comporte des expressions du langage parlé
- les comparaisons évoquent la nature et la campagne (oiseaux, bassins, étang)
- le métier à tisser devient un objet vivant (personnification de la navette)
- la navette semble dotée d’un pouvoir magique
- le chant est associé au travail (« aime joie »)
- l’étoffe se construit comme par magie.On choisira comme problématique l’évocation faussement « réaliste » d’un métier ancestral que le narrateur transfigure par la « magie » d’un personnage.
Classez les observations qui se recoupent en deux axes de lecture, que vous pourrez décomposer en trois idées directrices qui progressent du simple au complexe, du concret à l’abstrait. Vous pourrez, pour opérer ce travail de synthèse, utiliser le tableau suivant pour chacun des axes de lecture :AXE DE LECTURE 1 : …….. Idée directrices
Procédés relevés
Interprétation
…
… … …
… … … … …
22 mai 2009 à 1 01 55 05555
Corrigé
un monde réaliste
- un contexte rural :
10 – 9
- une scène vue :
3 – 4
- un travail ancestral :
2 – 6 – 13
un univers magique
- un auditoire subjugué :
5 – 8
- une transfiguration du réel :
1 – 7
- magie :
11 – 12 – 14
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