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Extrait : L’Étranger, II, V (1942)

21 mai 2009

1.Extraits

Albert CAMUS   L’Étranger, II, V (1942)

Extrait : L'Étranger, II, V (1942) dans 1.Extraits camus2  J’ai cru longtemps – et je ne sais pas pourquoi – que pour aller à la guillotine, il fallait monter sur un échafaud, gravir des marches. Je crois que c’était à cause de la Révolution de 1789, je veux dire à cause de tout ce qu’on m’avait appris ou fait voir sur ces questions. Mais un matin, je me suis souvenu d’une photographie publiée par les journaux à l’occasion d’une exécution retentissante.

En réalité, la machine était posée à même le sol, le plus simplement du monde. Elle était beaucoup plus étroite que je ne le pensais. C’était assez drôle que je ne m’en fusse pas avisé plus tôt. Cette machine sur le cliché m’avait frappé par son aspect d’ouvrage de précision, fini et étincelant. On se fait toujours des idées exagérées de ce qu’on ne connaît pas. Je devais constater au contraire que tout était simple : la machine est au même niveau que l’homme qui marche vers elle. Il la rejoint comme on marche à la rencontre d’une personne. Cela aussi était ennuyeux. La montée vers l’échafaud, l’ascension en plein ciel, l’imagination pouvait s’y raccrocher. Tandis que, là encore, la mécanique écrasait tout : on était tué discrètement, avec un peu de honte, et beaucoup de précision.
Il y avait aussi deux choses à quoi je réfléchissais tout le temps : l’aube et mon pourvoi.[...] C’est à l’aube qu’ils venaient, je le savais. En somme, j’ai occupé mes nuits à attendre cette aube. Je n’ai jamais aimé être surpris. Quand il m’arrive quelque chose, je préfère être là. C’est pourquoi j’ai fini par ne plus dormir qu’un peu dans mes journées et, tout le long de mes nuits, j’ai attendu patiemment que la lumière naisse sur la vitre du ciel. Le plus difficile, c’était l’heure douteuse où je savais qu’ils opéraient d’habitude. Passé minuit, j’attendais et je guettais. Jamais mon oreille n’avait perçu tant de bruits, distingué de sons si ténus. Je peux dire, d’ailleurs, que d’une certaine façon j’ai eu de la chance pendant toute cette période, puisque je n’ai jamais entendu de pas. Maman disait souvent qu’on n’est jamais tout à fait malheureux. Je l’approuvais dans ma prison, quand le ciel se colorait et qu’un nouveau jour glissait dans ma cellule, parce qu’aussi bien, j’aurais pu entendre des pas et mon cœur aurait pu éclater. Même si le moindre glissement me jetait à la porte, même si, l’oreille collée au bois, j’attendais éperdument jusqu’à ce que j’entende ma propre respiration, effrayé de la trouver rauque et si pareille au râle d’un chien, au bout du compte, mon cœur n’éclatait pas et j’avais encore gagné vingt-quatre heures.

 

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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