Le subtil voleur de Beït el-mel (2e partie)
Autour de Tata Nora
Résumé de la 1re partie n
Pour éviter que toute la famille ne soit découverte, le subtil voleur
décapite et enterre la tête de son frère qui venait de tomber dans le
piège tendu par les gardiens de Beït el-mel.
Le
voleur savait que sa mère ne retiendrait pas ses cris et ses larmes. Il
avait déjà eu beaucoup de mal à étouffer ses lamentations le soir où il
avait enterré la tête dans la cour. Il promit à sa mère de voler le
corps de son frère pour lui donner une sépulture, mais auparavant, il
devait trouver une solution pour qu’elle ne soit pas démasquée le jour
où elle verrait le corps de son cadet suspendu à un arbre. Aucune mère
au monde ne pourrait maîtriser ses émotions dans une situation
pareille. Le voleur eut une idée. Il lui conseilla :
— Ma mère ! Prends ces sacs. Mets dans l’un des grains de blé, dans le
deuxième des fèves sèches, dans le troisième des pois chiches, dans le
quatrième le l’orge et dans l’autre du seigIe. Multiplie les sacs et
les graines. Lorsque tu arriveras devant le corps de mon défunt frère,
laisse le tout tomber et les graines s’éparpiller. Ensuite, tu n’auras
qu’à laisser éclater ton chagrin en pleurant haut et fort. Lorsque les
gardes viendront t’interroger, dis-leur que tu pleures car tes graines
se sont mélangées.
La vieille suivit ces conseils et pleura devant le cadavre de son fils.
Elle soulagea son cœur et son foie comme on dit. Elle s’arracha les
cheveux, se lacéra les joues et frappa ses cuisses de ses mains.
Lorsque les gardes vinrent pour la saisir, elle leur cria :
— C’est votre faute, cette chose horrible suspendue à l’arbre m’a
effrayée à tel point que j’ai laissé tomber toutes mes graines. C’était
ma réserve pour l’hiver. Que vais-je devenir maintenant que tout est
mélangé ?
Les gardes s’excusèrent et la conduisirent auprès du Sultan qui lui offrit une pièce d’or pour la dédommager.
Dans la nuit, le subtil voleur coIla sur les cornes de quelques boucs
des bougies allumées. Il lâcha le troupeau en direction des gardes qui
surveillaient le cadavre toujours suspendu à l’arbre. Lorsque ceux-ci
aperçurent dans le noir les reflets des cornes et des museaux avancer
vers eux, ils détalèrent en hurlant tout effrayés :
— C’est ‘azrain ! C’est ‘azrain qui vient prendre le cadavre.
Ils se sauvèrent sans demander leur reste. Le voleur en profita pour
emporter le cadavre qu’il enterra avec la tête dans la cour. Le Sultan
était furieux :
— Chiens, fils de chiens ! Incapables, fils d’incapables ! Vous avez laissé le corps disparaître. (à suivre…)
L’Algérie des contes et légendes Nora Aceval
5 mai 2009
Nora Aceval