Mardi 17 Mars 2009 12h31mn 42s
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« benbrahim djilali »
Paru dans Le Patriote n° 51 du 15 mars 2009.
La conscience tranquille est un doux oreiller Un jour, alors qu’il était en visite de travail et d’inspection dans un village de l’Algérie profonde, le président Houari Boumediène a été agréablement surpris par l’aplomb de la première Dame du village. Après avoir visité plusieurs sites, le Président décida de s’enquérir de l’état d’avancement des travaux d’un village socialiste qui relevait administrativement de la commune de Hamadia, ex Victor Hugo, dans la Wilaya de Tiaret. C’était le branle bas de combat, les services du protocole veillaient aux grains, les services de sécurité à l’affut du moindre détail. Les responsables locaux avaient les nerfs à fleur de peau, les remarques désobligeantes et les engueulades fusaient de partout. C’était l’enfer ! Quand enfin arriva le président, il fut reçu par madame le maire qui lui remit les clés de la ville. N’étant pas à sa première sortie, le président avait parfaitement bien remarqué que tout le monde était tendu, et pour détendre l’atmosphère il interpella la maire et lui demanda à brule pourpoint : Alors madame ! Comment va Victor Hugo ? Même désarçonnée, la maire garda son calme et répondit avec audace : Monsieur le président, Victor Hugo est parti mais les misérables sont restés ! Ne s’attendant pas à pareille répartie, le président éclata d’un rire franc et sincère au point où ses plus proches collaborateurs, qui lui connaissaient une certaine réserve dans ses sorties en public, en furent subjugués. Un ami à qui j’ai raconté cette histoire et qui est du genre plutôt sceptique mais surtout méticuleux comme un horloger suisse, voulait savoir si cette dernière était réelle ou inventée ; je lui répondis qu’elle était belle et bien vraie. Il s’étonna et me demanda le nom de la maire, bien entendu, je répondis que je l’ignorais et qu’à la limite je ne voulais même pas le savoir puisque je n’en voyais pas l’importance. Déçu, il se mit à soliloquer : « Je suis sûr et certain que cette femme était une parente du président …Sinon comment expliquer une telle effronterie ?…. Je dois éclaircir la situation que je trouve incroyable .… d’ailleurs comment se fait il qu’elle fût maire au moment du parti unique? ..… Cette histoire cache quelque chose et je dois le découvrir… Moi, j’ai souvenance d’un chef de Daïra qui s’est tiré dessus à l’approche de la visite présidentielle, et cela s’est passé dans la même wilaya… Alors, de là à dire qu’une femme osât s’adresser ainsi à un gars de la trempe Boumediene relève presque du blasphème… » Je ne voyais pas bien où il voulait en venir à chercher des poux là où il n y en avait pas puisque Je lui avais narré cette histoire uniquement parce que je la trouvais belle et surtout parce qu’elle dévoilait un pan de la personnalité du défunt président, le rendant ainsi plus humain et plus sympathique, avec un sens de l’humour qu’on ne lui connaissait pas. « Te souviens-tu des longues discussions, lui demandais-je, que nous avions quand nous étions jeunes et des conclusions que nous en tirions à propos du -Moment-De- Vérité -qui surgit ainsi dans la vie des hommes et qui se négocie comme un chauffeur négocie un virage. Pour notre cas, ce moment de vérité a eu lieu quand la maire, malgré tout ce qu’elle encourait comme risques, osa quand même une pareille répartie devant un président connu et réputé pour son intransigeance et sa sévérité alors qu’elle aurait pu se contenter d’une réponse simple et banale. En un laps de temps très court elle fit son choix et décida que c’était la réponse à donner. Il est certain qu’elle n’a pas agi ainsi pour se faire remarquer puisqu’elle savait qu’elle risquait très gros. Mais comme elle n’avait rien à se reprocher, elle a répondu simplement, comme le lui dictait sa conscience, qu’on devine tranquille. Cette bonne dame devait sûrement bien dormir, et comme le dit si bien un dicton russe que j’emprunte à Malek Haddad : la conscience tranquille est un doux oreiller. Djilali BenBrahim |
17 mars 2009 à 19 07 11 03113
Nous jugeons les actes de l’histoire avec la conscience de notre époque. Or la conscience ne peut pas devancer celle qui prévaudra dans une société de l’avenir… et vous ne pouvez pas retourner pour changer le passé.
Paul Ohl
beau temoignage pour le 08 mars