Mardi 24 Février 2009 17h00mn 13s
Nouveau commentaire sur l’article #1715 « Concentration : apprendre à se concentrer »
Auteur : aliamostefaoui (IP: 81.22.89.85 , 81.22.89.85)
E-mail : aliam2000@yahoo.fr
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Commentaire:
Antiquité
Aristote (Les Politiques, Livre VII, chap. VII), Poseidonios d’Apamée et Hippocrate ont relevé l’influence des éléments climatiques sur les comportements humains[1].
Bonjour
j’espère que j’ai répondu à votre question
XIVe siècle
Ibn Khaldoun, dans la première section « Sur la civilisation en général » des Muqaddima (ou Prolégomènes de l’histoire universelle), écrites en 1377, consacre son troisième discours préliminaire entre autres à l’influence exercée par l’atmosphère sur le teint des hommes et sur leur état en général en plus de dédier le quatrième à l’influence exercée par l’air sur le caractère des êtres humains. XVIe siècle
Dans un chapitre intitulé « Du reiglement qu’il faut tenir pour accommoder la forme de Republique à la diversité des hommes, et le moyen de cognoistre le naturel des peuples » au sein de ses Six Livres de la République (publiés à Paris en 1576), Jean Bodin mentionne l’influence du climat sur la vigueur des habitants (livre V, chap. I). XVIIe siècle
Nicolas Boileau, Fénelon, Jean de La Bruyère admettent la théorie des climats[1].
« Des siècles, des pays, étudiez les moeurs
Les climats font souvent les diverses humeurs »
— Nicolas Boileau, Art poétique, III, v. 113-114
XVIIIe siècle
Henri de Boulainvilliers discute de la théorie des climats dans ses ouvrages astrologiques[1].
Du point de vue de l’esthétique, les Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture de l’abbé Jean-Baptiste Dubos, publiées à Paris en 1719, soutiennent que certains peuples, nominalement les Français, les Grecs et les Italiens, démontrent un meilleur goût, produisent un plus grand nombre d’artistes dont les créations sont de qualité supérieure. Bien que l’ouvrage pourrait s’avérer un prolongement tardif de la querelle des Anciens et des Modernes, il fait montre d’un penchant pour la théorie des climats.
En médecine, en Angleterre principalement, les propriétés de l’air sont mises en corrélation avec la propagation des épidémies. À cet effet, l’Écossais John Arbuthnot, proche d’Alexander Pope et de Jonathan Swift, publie à Londres en 1733 An Essay Concerning the Effects of Air on Human Bodies (Essai des effets de l’air sur le corps humain).
L’abbé François Ignace d’Espiard de La Borde publie à Bruxelles en 1743 ses Essais sur le génie et le caractère des nations, réimprimés sous le titre L’Esprit des nations, où il postule que « Le climat est, de toutes les causes, la plus universelle, la plus puissante »[2]. Cette affirmation s’inscrit dans le débat sur les origines de l’homme (monogénisme ou polygénisme) et sur l’opposition entre la civilisation et l’état sauvage.
Montesquieu
Montesquieu dote la théorie des climats d’une force retentissante en l’appliquant au seul domaine politique. Il l’esquisse d’abord dans les Lettres persanes, puis lui donne une place considérable dans De l’esprit des lois :
« Ce sont les différents besoins dans les différents climats, qui ont formé les différentes manières de vivre ; et ces différentes manières de vivre ont formé les diverses sortes de lois »
— Montesquieu, L’Esprit des lois, 3e partie, Livre XIV, chap. X.
Ainsi, la théorie des climats permet de résoudre le problème à la base de l’anthropologie : comment rendre compte de la diversité culturelle tout en maintenant l’unicité humaine. Elle offre une solution rationnelle à l’apparemment chaotique distribution des caractéristiques politico-sociales à travers les peuples, dont les mœurs et coutumes sont relevées et présentées par et pour les Européens dans les abondants récits de voyage[1].
« la notion d’un déterminisme géographique s’accorde avec deux tendances majeures de la philosophie des Lumières : d’une part, elle fournit au « spinozisme » latent ou avoué de l’époque un contenu concret et l’esquisse d’une confirmation expérimentale; d’autre part, en supposant les hommes individuellement ou collectivement passifs à l’action du milieu naturel, elle rejoint l’hypothèse sensualiste, et surtout l’interprétation matérialiste qu’en donnent fréquemment les disciples français de Locke »
— Jean Ehrard, L’idée de nature en France dans la première moitié du XVIIIe siècle, Albin Michel, coll. « Bibliothèque de « L’Évolution de l’humanité » », Paris, 1994, p. 691
Il affirme que certains climats sont supérieurs à d’autres, le climat tempéré de France étant l’idéal. Il soutient que les peuples vivant dans les pays chauds ont tendance à s’énerver alors que ceux dans les pays du nord sont rigides. Montesquieu fut là influencé par La Germanie de Tacite, un de ses auteurs favoris.
Montesquieu a été influencé par les thèses médicales contemporaines, puisqu’il ouvre son exposition des rapports des lois avec le climat par une explication physiologique des effets du froid et du chaud sur les activités humaines, tout à fait banale pour l’époque :
« On ne sauroit contester l’influence du climat sur le physique des passions, des goûts, des mœurs. Les plus anciens medecins avoient observé cette influence ; & les considérations de cette classe sont des objets si familiers aux Medecins, que-si l’auteur de l’esprit des lois avoit pû supposer que leur doctrine sur cette matiere fût assez répandue, il auroit pû se contenter d’assûrer que les lois, les usages, le genre de gouvernement de chaque peuple, avoient un rapport nécessaire avec ses passions, ses goûts, ses mœurs, sans se donner la peine de déterminer le rapport de ces passions, de ces goûts, de ces mœurs, avec sa constitution corporelle dominante, & l’influence du climat. Les lumieres supérieures de l’auteur l’ont pourtant sauvé de l’écueil presque inévitable, pour les talens même les plus distingués qui s’exercent sur des sujets qui leur sont étrangers. La partie médicinale des observations de l’auteur de ce livre sur les climats, mérite l’éloge des Medecins. Voyez le XIV. livre de l’esprit des lois. »
— « Climat, (Med) », Encyclopédie, vol. III, p. 534.
Références littéraires
À la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, les références à la théorie des climats pullulent dans les oeuvres littéraires. Le corrupteur, Gaudet, dans Le Paysan perverti (1775) de Nicolas Edme Restif de La Bretonne, y prend son appui pour relativiser la chasteté[3]. Lord Byron ironise dans son Don Juan (1819) :
«
‘T is a sad thing, I cannot choose but say,
And all the fault of that indecent sun,
Who cannot leave alone our helpless clay,
But will keep baking, broiling, burning on,
That howsoever people fast and pray,
The flesh is frail, and so the soul undone:
What men call gallantry, and gods adultery,
Is much more common where the climate’s sultry.
Happy the nations of the moral North!
Where all is virtue, and the winter season
Sends sin, without a rag on, shivering forth
»
— Chant I, strophes 63-64
« C’est fâcheux, je l’avoue; la faute en est à ce soleil indécent qui ne peut laisser en repos notre argile chétive, mais qui la chauffe, la cuit, la brûle, si bien que, nonobstant jeûnes et prières, la chair est fragile et l’âme se perd : ce que les hommes appellent galanterie, et les dieux adultère, est beaucoup plus commun dans les pays chauds.
Heureux les peuples du moral septentrion, où tout est vertu, où l’hiver envoie le péché grelotter tout nu »
Notes
↑ a b c d Nico
le Hafid-Martin, « Évolution et critique de la théorie des climats à travers le XVIIIe siècle en France : Du déterminisme géographique à la liberté politique [archive] » sur Sito Web Italiano per la Filosofia, 2001. Consulté le 25 juillet 2008
↑ François Ignace d’Espiard de La Borde, Essais sur le génie et le caractère des nations, Bruxelles, 1743, partie III, p. 5
↑ Nicolas Edme Restif de La Bretonne, Le Paysan perverti : ou Les dangers de la ville, histoire récente mise à jour d’après les véritables lettres des personnages [archive], Amsterdam, p. 84-93
Le passage précis sur la chasteté n’apparaît pas dans cette édition. Il faut se référer au texte de 1782.
Ressources
Roger Mercier, « La théorie des climats des Réflexions critiques à L’Esprit des lois », dans Revue d’histoire littéraire de la France, vol. 58, janvier – mars 1953, p. 17-37 Roger Mercier, « La théorie des climats des Réflexions critiques à L’Esprit des lois », dans Revue d’histoire littéraire de la France, vol. 58, avril – juin 1953, p. 159-175
XVIIIe siècle [modifier]
Henri de Boulainvilliers discute de la théorie des climats dans ses ouvrages astrologiques[1].
Du point de vue de l’esthétique, les Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture de l’abbé Jean-Baptiste Dubos, publiées à Paris en 1719, soutiennent que certains peuples, nominalement les Français, les Grecs et les Italiens, démontrent un meilleur goût, produisent un plus grand nombre d’artistes dont les créations sont de qualité supérieure. Bien que l’ouvrage pourrait s’avérer un prolongement tardif de la querelle des Anciens et des Modernes, il fait montre d’un penchant pour la théorie des climats.
En médecine, en Angleterre principalement, les propriétés de l’air sont mises en corrélation avec la propagation des épidémies. À cet effet, l’Écossais John Arbuthnot, proche d’Alexander Pope et de Jonathan Swift, publie à Londres en 1733 An Essay Concerning the Effects of Air on Human Bodies (Essai des effets de l’air sur le corps humain).
L’abbé François Ignace d’Espiard de La Borde publie à Bruxelles en 1743 ses Essais sur le génie et le caractère des nations, réimprimés sous le titre L’Esprit des nations, où il postule que « Le climat est, de toutes les causes, la plus universelle, la plus puissante »[2]. Cette affirmation s’inscrit dans le débat sur les origines de l’homme (monogénisme ou polygénisme) et sur l’opposition entre la civilisation et l’état sauvage.
Montesquieu
Montesquieu dote la théorie des climats d’une force retentissante en l’appliquant au seul domaine politique. Il l’esquisse d’abord dans les Lettres persanes, puis lui donne une place considérable dans De l’esprit des lois :
« Ce sont les différents besoins dans les différents climats, qui ont formé les différentes manières de vivre ; et ces différentes manières de vivre ont formé les diverses sortes de lois »
— Montesquieu, L’Esprit des lois, 3e partie, Livre XIV, chap. X.
Ainsi, la théorie des climats permet de résoudre le problème à la base de l’anthropologie : comment rendre compte de la diversité culturelle tout en maintenant l’unicité humaine. Elle offre une solution rationnelle à l’apparemment chaotique distribution des caractéristiques politico-sociales à travers les peuples, dont les mœurs et coutumes sont relevées et présentées par et pour les Européens dans les abondants récits de voyage[1].
« la notion d’un déterminisme géographique s’accorde avec deux tendances majeures de la philosophie des Lumières : d’une part, elle fournit au « spinozisme » latent ou avoué de l’époque un contenu concret et l’esquisse d’une confirmation expérimentale; d’autre part, en supposant les hommes individuellement ou collectivement passifs à l’action du milieu naturel, elle rejoint l’hypothèse sensualiste, et surtout l’interprétation matérialiste qu’en donnent fréquemment les disciples français de Locke »
— Jean Ehrard, L’idée de nature en France dans la première moitié du XVIIIe siècle, Albin Michel, coll. « Bibliothèque de « L’Évolution de l’humanité » », Paris, 1994, p. 691
Il affirme que certains climats sont supérieurs à d’autres, le climat tempéré de France étant l’idéal. Il soutient que les peuples vivant dans les pays chauds ont tendance à s’énerver alors que ceux dans les pays du nord sont rigides. Montesquieu fut là influencé par La Germanie de Tacite, un de ses auteurs favoris.
Montesquieu a été influencé par les thèses médicales contemporaines, puisqu’il ouvre son exposition des rapports des lois avec le climat par une explication physiologique des effets du froid et du chaud sur les activités humaines, tout à fait banale pour l’époque :
« On ne sauroit contester l’influence du climat sur le physique des passions, des goûts, des mœurs. Les plus anciens medecins avoient observé cette influence ; & les considérations de cette classe sont des objets si familiers aux Medecins, que-si l’auteur de l’esprit des lois avoit pû supposer que leur doctrine sur cette matiere fût assez répandue, il auroit pû se contenter d’assûrer que les lois, les usages, le genre de gouvernement de chaque peuple, avoient un rapport nécessaire avec ses passions, ses goûts, ses mœurs, sans se donner la peine de déterminer le rapport de ces passions, de ces goûts, de ces mœurs, avec sa constitution corporelle dominante, & l’influence du climat. Les lumieres supérieures de l’auteur l’ont pourtant sauvé de l’écueil presque inévitable, pour les talens même les plus distingués qui s’exercent sur des sujets qui leur sont étrangers. La partie médicinale des observations de l’auteur de ce livre sur les climats, mérite l’éloge des Medecins. Voyez le XIV. livre de l’esprit des lois. »
— « Climat, (Med) », Encyclopédie, vol. III, p. 534.
Références littéraires
À la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, les références à la théorie des climats pullulent dans les oeuvres littéraires. Le corrupteur, Gaudet, dans Le Paysan perverti (1775) de Nicolas Edme Restif de La Bretonne, y prend son appui pour relativiser la chasteté[3]. Lord Byron ironise dans son Don Juan (1819) :
«
‘T is a sad thing, I cannot choose but say,
And all the fault of that indecent sun,
Who cannot leave alone our helpless clay,
But will keep baking, broiling, burning on,
That howsoever people fast and pray,
The flesh is frail, and so the soul undone:
What men call gallantry, and gods adultery,
Is much more common where the climate’s sultry.
Happy the nations of the moral North!
Where all is virtue, and the winter season
Sends sin, without a rag on, shivering forth
»
— Chant I, strophes 63-64
« C’est fâcheux, je l’avoue; la faute en est à ce soleil indécent qui ne peut laisser en repos notre argile chétive, mais qui la chauffe, la cuit, la brûle, si bien que, nonobstant jeûnes et prières, la chair est fragile et l’âme se perd : ce que les hommes appellent galanterie, et les dieux adultère, est beaucoup plus commun dans les pays chauds.
Heureux les peuples du moral septentrion, où tout est vertu, où l’hiver envoie le péché grelotter tout nu »
24 février 2009
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