Des personnages – de petites gens en fait – ont su tisser entre eux et la population par leur spontanéité et leur débilité tout à fait sympathiques des liens étroits, parfois même passionnels. La plupart sont décédés et il serait indécent, voire injuste de ne pas honorer leur mémoire, maintenant que ces mascottes appartiennent au patrimoine du bled. Sans ces personnages, le village aurait l’air d’une œuvre inachevée.
3- Mma Messaouda, la dame au tuyau d’eau.
Voilà une femme qui n’a jamais cessé de faire planer sur elle une espèce de fascination mystique. Mma Messaouda est crainte de beaucoup de gens. Tout chez elle est plein de dignité et de paix. Très sobre, parlant peu, il se dégage de ses petits yeux méditatifs de fennec une sorte de suffisance sereine. Deux cheveux follets, des antennes émettant ou recevant je ne sais quelles ondes insondables, lui sortent de son menton ! Si vous la considériez au grand jour, vous verriez des poils ambrés lui labourer le visage et sous ses narines un embryon de moustaches lui fausser une féminité d’ailleurs si peu contestée ! Sa force tranquille, en contradiction avec son apparence menue, lui procure une sensation d’apaisement intérieur. Harnachée dans son magroun, elle est si inébranlable et si lointaine qu’on a du mal à ne pas en être impressionnés ! Des pouvoirs insoupçonnés lui sont attribués. C’est du moins ce qui se dit et se perpétue de bouche à oreille depuis au moins une génération et demie. Maître M.A, un ami à moi, un respectable avocat dont j’apprécie la compétence et le jugement m’a révélé ce qu’elle lui avait confié un certain 1991 ! « Les tombes se creuseront et beaucoup de vies périront ! » Pouvoir de visionnaire ou don de prémonition ? Il n’est pas dans mes prétentions d’aborder une pareille controverse, laissons cela pour ceux qui ont le savoir et la sagesse … mais ce qui fut certain est que nous connûmes pendant longtemps des lendemains sanglants !
Un jour, deux fidèles sans histoires dont l’un est toujours en vie ont abordé après la prière du soir « asr* » l’imam de la mosquée lui soumettant un problème : « Comment expliquez-vous le comportement de Mma Messaouda qui ne cesse de gaspiller de l’eau ? » L’imam, quelque peu gêné ne leur donna aucune réponse probante. En sortant de la mosquée pour aller prendre un café, ils sont interpellés par Mma Messaouda en personne : « Et alors, on se plaint de moi chez l’imam ! ». Les deux amis restèrent sans voix…
Asr : prière de fin d’après midi
C’est vrai qu’elle avait ce rituel. Vous ne risquez pas de la rater ni de la confondre avec une autre. Elle a longtemps séjourné chez « Kaba » le vulcanisateur du centre ville. Du matin au soir, à la manière d’un aristocrate fumant une cigarette la tenant plus dans la main qu’à la bouche, elle passe sa vie à arroser de son tuyau les rigoles et les chaussées de la grande rue !
Jusqu’à sa mort, personne n’avait décodé son obsession de verser de l’eau à longueur de journées ! Mma Messaouda est partie avec son secret en catimini, juste comme un filet d’eau qui clapote un instant pour aller mourir quelques parts le long d’une rigole…
25 octobre 2010 à 4 04 01 100110
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