Dédié à mes anciens élèves ,à ceux qui ont enseigné avec moi et à si Mahmoudi A.E.K décédé en juillet 96.
Non, je n’ai pas oublié
Vos langues tirées ,vos doigts crispés
Sur la plume qui crisse au moment de l’écriture
Pour arriver à tracer de belles lettres sans bavure.
Non ,je n’ai pas oublié
Vos yeux écarquillés sur vos ardoises grises
Pour mieux apprécier les tracés et les frises.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire
Non, je n’ai pas oublié
Vos chéchias rouges sur vos têtes , posées
Comme des coquelicots dans un champ de blé, parsemés
Vos djellabas rayées
Vos burnous blancs au vent,
Qui vous permettent de jouer à l’avion, avec ses pans.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos pantalons mignons, bouffons, sans poche, ni ceinture,
Relevé sans relâche d’une petite main adroite
Et amortissant parfois les chocs d’une règle plate
Ils sont là, gravés dans ma mémoire
Non, je n’ai pas oublié.
Vos lèvres tourmentées, vos voix gênées,
Vos grimaces en tous genres.
Amusantes et bizarre, sans tension
Qu’exige en lecture, l’effort de prononciation
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos plumes, vos encriers et quelques doigts tachés.
Le buvard sous la main et la pate à modeler
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos jeux innocents évoluant au rythme des saisons.
Ce sont les noyaux, les osselets, les billes multicolores,
La toupie, la marelle et le saute mouton.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos mains qui tremblent, vos regards lointains,
Vos doigts qui se tordent
Devant un problème difficile
Et vos sursauts de joie dès la solution trouvée.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos files indiennes joyeuses, devant la cantine,
Armées de vos assiettes et cuillères en aluminium,
Prêtées par la voisine.
Vos petits tapages et bousculades bénignes.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos multiplications chantées 2×1, 2×2, 2×3, 2×3 ,2×4.
Vos récitations mimées,
Vos cartables frontières en dictée,
Vos doigts mordillés en calcul.
Le lapin qui s’enfuit en leçons de choses
Et les poursuites mouvementées.
L’hirondelle qui rentre en classe sans permission
Et le chahut qui s’en suit.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Les kermesses, les banderoles et tous les stands représentés.
Les séances de cinéma sous le préau, dans une salle aménagée
Où vous-mêmes, Laurel et Hardy, Charlot étaient rois.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos scènes théâtrales, vos déguisements
Vos fausses moustaches, fausses barbes.
Vos gandouras trop longues, vos burnous qui vous étouffent
Vos chants « chorales » qui montent au ciel.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Vos victoires en volley – ball,
Vos sueurs versées,
Vos maillots mouillés,
Vos coupes rapportées.
Aux examens, toujours les résultats espérés.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Non, je n’ai pas oublié
Les séparations douloureuses de fins d’années scolaires.
Le dernier jour.
Seul dans la cour
Un dernier tour dans les classes nues et vides,
Un vide profond, un silence effrayant,
Nostalgique.
Puis dans ma tête fiévreuse
Des cris, des chocs, des bruits,
Des coups de sifflets, des appels
Des ordres, des reproches,
Des portes qui claquent,
Une vitre qui se brise
Quelques larmes glissent sur mes joues.
Un dernier regard dans la cour
La gorge serrée
Je ferme la porte d’entrée à double tour
Pour trois mois de vacances.
Ils sont là, gravés dans ma mémoire.
Je les emporterai dans ma tombe.
Le 05/07/98
13 août 2008
Non classé